Actualités Delen

L’énergie, la principale dépendance de l'homme.

|

Lors d'un événement organisé dans notre bureau de Bruxelles, nous avons reçu Daniel Dobbeni. Il est notamment ancien PDG d'Elia, cofondateur d'ETHAN SRL – une société de conseil spécialisée dans la stratégie, les systèmes d'énergie renouvelable, les réseaux d'énergie et les systèmes électriques –, et président du conseil d'administration d'Ukrenergo, le gestionnaire du réseau de transport d'électricité ukrainien. Daniel nous a éclairés sur l'avenir complexe de l'énergie et l’influence des alliances stratégiques et rapports de forces géopolitiques sur ce dernier. Nous lui avons posé trois questions pour mieux comprendre ce que l'avenir nous réserve.

On parle d'énergie presque tous les jours. Ce n'était pas le cas il y a quelques années. Comment cela se fait-il ?

Daniel Dobbeni : Depuis le début de l'industrialisation, la plus grande dépendance de l'homme réside dans son besoin en énergie. L'énergie est ainsi devenue l'une des armes économiques les plus puissantes. La demande d'énergie primaire - en particulier le charbon, le pétrole et le gaz naturel - continue d'augmenter à une vitesse fulgurante. Avec le sentiment constant de pénurie, les prix de ces combustibles et de l'électricité s'envolent aux moindres tensions géopolitiques, car à ce jour, les énergies renouvelables ne peuvent certainement pas prendre le relais des combustibles fossiles. L'approvisionnement en gaz russe étant pratiquement à l'arrêt, une grande quantité de gaz naturel, sous forme de gaz naturel liquéfié (GNL), est importé par bateau-citerne (ou méthanier) depuis d'autres régions du monde. Selon la pression et la température, le gaz naturel liquide occupe un volume 240 à 390 fois inférieur à celui qu'il occupe sous forme gazeuse. C'est pourquoi certains pays exportateurs, comme le Qatar, se pressent de développer leurs installations de production de GNL, ainsi que leur flotte de méthaniers. Parallèlement, en Europe, des terminaux GNL capables de convertir le gaz naturel de la forme liquide à la forme gazeuse sont rapidement construits. Ces installations d'exportation et d'importation sont des projets importants qui devraient commencer à fonctionner à partir de 2026. D'ici là, le marché du gaz naturel et de l'électricité pourrait connaître des fluctuations de prix.

Quelles solutions structurelles sont élaborées pour continuer à répondre à cet important besoin en énergie sans augmenter davantage le volume des gaz à effet de serre ?

Daniel DobbeniDaniel Dobbeni : Il n'y a pas de solution parfaite dans ce domaine, mais il existe un large éventail de mesures, dont la plupart sont accessibles. La première consiste à réduire la demande en énergie primaire, d'une part en diminuant sa consommation grâce, entre autres, à des procédés plus économes en énergie – par exemple grâce à des pompes à chaleur ou aux voitures électriques –, et d'autre part, en maximisant la production d'énergie électrique à partir de sources d'énergie renouvelables avec peu ou pas d'émissions de gaz à effet de serre.  À l'échelle mondiale, l’objectif de neutralité carbone d’ici 2050 est au centre des préoccupations et des efforts de chacun. Cela signifie que les émissions mondiales de gaz à effet de serre dues à l'activité humaine sont en équilibre avec l'absorption naturelle des émissions par notre planète. En d'autres termes, malgré les émissions de dioxyde de carbone, la quantité retirée de l'atmosphère équivaut à celle qui y est émise, de sorte qu'il n'y a pas d'augmentation nette. Pour y parvenir, les émissions d'origine humaine doivent atteindre la neutralité carbone d'ici à 2050.

Cet objectif nécessitera des investissements considérables pour développer les technologies énergétiques nécessaires et réduire les coûts. Certains secteurs sont plus difficiles à décarboniser que d'autres, comme les industries lourdes, notamment l'acier et le ciment, et les transports. Cela nécessite de nouvelles solutions technologiques respectueuses du climat, notamment l'hydrogène produit à partir d'énergies renouvelables pour remplacer le gaz naturel.

L'objectif de neutralité carbone est un objectif majeur à l’échelle internationale pour éviter les pires conséquences du changement climatique. Plusieurs pays se sont engagés à atteindre cet objectif d'ici 2050 ou avant. Toutefois, une action mondiale urgente et coordonnée – en particulier avec les économies émergentes – est nécessaire au cours de la prochaine décennie pour faire face à l'aggravation du changement climatique.

Le monde est-il prêt pour cela ?

Daniel Dobbeni : Il nous reste 27 ans jusqu'en 2050 – c'est court, mais il n'est pas trop tard. Avec l'éclatement de la guerre entre la Russie et l'Ukraine, la dépendance au gaz naturel russe est apparue comme une cruelle évidence. Les États membres de l'Union européenne tentent à présent de mettre en place des systèmes leur permettant de devenir eux-mêmes plus indépendants. Cela va de pair avec une réindustrialisation de l'Europe et de la Belgique. Toutefois, une moindre dépendance à l'égard de pays disposant de nombreuses ressources en énergie primaire, dont le gaz naturel, n’est pas la seule préoccupation de l'Europe. L'énergie éolienne, l'énergie solaire, les batteries pour stocker cette énergie, les véhicules électriques… Tout cela nécessite des matières premières spécifiques. Si nous ne nous organisons pas, dans quelques années, nous ne serons plus aussi dépendants de la Russie, mais bien de la Chine, de l'Australie, du Brésil ou de l'Inde. Est-il trop tard pour l'Europe ? Non, nous disposons de nombreuses technologies pour trouver nous-mêmes une solution. Le recyclage des terres rares semble jouer un rôle crucial à cet égard. Comme nous manquons de matières premières, il est important que nous mettions en place des systèmes pour les rendre réutilisables afin de réduire notre dépendance à l'égard des importations. Trop tard, ce n'est pas, mais il est grand temps.

Envie de découvrir un autre orateur inspirant ?

 Vous êtes le/la bienvenu(e) à l'un de nos lunchs entrepreneurs. Faites-nous part de votre intérêt en envoyant un e-mail à events@delen.bank et nous vous informerons d’un prochain événement.

Restez informé(e)

Vous souhaitez recevoir nos analyses boursières ainsi que les dernières actualités en matière fiscale et juridique ? Delen Expertise, notre lettre d’information numérique, synthétise chaque trimestre toutes les récentes évolutions sous forme d’articles, d’interviews et de vidéos. Abonnez-vous.