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Jacques Delen : "Nous voulons amener du rendement à nos clients, sans prendre de risques démesurés"

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Depuis le rachat de Degroof Petercam par Crédit Agricole, Delen peut se targuer d'être la dernière banque privée belge indépendante. 

Par Gilles Quoistiaux – L’Echo

Son fondateur Jacques Delen perçoit encore des relais de croissance et vise les 15% de parts de marché.

Delen est la dernière banque privée belge indépendante sur le marché. Depuis le rachat de Degroof Petercam par Indosuez, filiale de Crédit Agricole, la banque peut mettre en avant cette spécificité auprès de ses clients.

Son fondateur, Jacques Delen, qui occupe la fonction de président du conseil d'administration, nous reçoit au siège anversois de l'établissement. Le banquier ne résiste pas au plaisir de nous faire visiter les lieux.

Superbement rénovés, les bureaux s'étendent derrière les façades de quatre maisons de maître progressivement rachetées par la banque privée et reliées entre elles par un couloir de verre. Les couloirs et les salles de réunion sont agrémentés d'œuvres d'art choisies dans le cadre d'un partenariat avec des galeristes.

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Depuis les années 1970, lorsque Jacques Delen a repris le bureau de change de son père avec ses deux frères, l'évolution est plutôt spectaculaire. Delen est devenue l'une des plus grandes banques privées de Belgique.

L'établissement bancaire revendique 52 milliards d'euros d'actifs sous gestion. "En 1990, Delen avait 0,5% de parts de marché. Aujourd'hui, nous nous situons entre 10% et 12%. En 30 ans, nous avons bien grandi . Essentiellement grâce au bouche-à-oreille, ce qui est un signe de confiance", souligne Jacques Delen. Et ce n'est pas fini: "Nous continuons à croître. Donc, pourquoi pas atteindre 15% de parts de marché?"

Pour cela, Delen pourrait grignoter une partie du gâteau à son concurrent Degroof Petercam, récemment passé sous bannière française. Ce changement d'actionnariat a-t-il déplu à certains clients de Degroof, qui seraient venus solliciter les services de Delen? "Quelques clients sont venus frapper à notre porte. Mais ce n'est pas un raz-de-marée", assure Jacques Delen. "Les clients sont généralement fidèles à leur banquier."

La banque privée compte renforcer sa présence à Bruxelles, où se trouvent plus de 40% des actifs sous gestion.

Sur le rachat de Degroof Petercam, Jacques Delen a une opinion nuancée. " C'est regrettable qu'un acteur de qualité, une banque respectable, passe dans des mains étrangères, avance le président de Delen. Quand des centres de décisions belges disparaissent, c'est toujours dommageable pour l'économie belge. D'un autre côté, Crédit Agricole va développer la banque, ce qui aura des retombées positives sur la Belgique."

Selon Jacques Delen, la nouvelle structure actionnariale, qui est beaucoup plus concentrée entre les mains d'un actionnaire principal (Crédit Agricole), va renforcer son concurrent. Un actionnariat fort est un gage de stabilité, estime le fondateur de Delen, qui se félicite d'avoir Ackermans & Van Haaren comme actionnaire dominant. "Cela permet de gérer la société en toute sérénité et de prendre des décisions de manière efficiente. Avec moins d'actionnaires, ça fonctionne mieux", estime Jacques Delen.

Un œil sur le dossier Degroof Petercam

La banque Delen aurait-elle pu se porter acquéreuse de Degroof? Jacques Delen a-t-il jeté un œil au dossier? "Tout le monde parle avec tout le monde. Nous ne sommes pas restés passifs", sourit-il. Mais le président du CA estime que les ADN des deux sociétés ne seraient pas accordés. " Grandir n'est pas toujours une voie vers le succès ", évoque Jacques Delen.

Ces dernières années, la banque privée a procédé à des acquisitions de petites officines. Mais Degroof Petercam aurait sans doute été un gros morceau. "Nous avons les liquidités nécessaires. Mais il ne faut pas être trop ambitieux. Notre objectif est de continuer sur notre propre voie", souligne Jacques Delen.

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La banque privée veut continuer à s'étendre géographiquement, pour servir sa clientèle dans toute la Belgique. L'idée est de proposer un bureau à tout client à maximum 30 minutes en voiture. Un nouveau bureau ouvrira prochainement à Charleroi. Et la banque privée compte renforcer sa présence à Bruxelles, où se trouvent plus de 40% des actifs sous gestion.

Au contraire des grandes banques, qui ont vu filer une part significative de leurs dépôts, la banque privée n'a pas été impactée par le succès du bon d'État. "Nous avons eu des questions de la part de nos clients. Mais ils n'ont pas été convaincus par le bon d'État. Tout simplement parce qu'ils disposent déjà de produits à terme intéressants, notamment dans le domaine des obligations. Pour nos clients, le bon d'État n'était pas meilleur que nos produits. C'est différent pour les épargnants qui ont de l'argent sur des livrets à des taux assez faibles."

Tout sur la gestion discrétionnaire

La stratégie de Delen est de tout miser sur la gestion discrétionnaire. Les clients laissent à leur banquier privé le soin de confectionner des portefeuilles performants. Jacques Delen ne croit pas aux offres hyper personnalisées et préfère développer une gestion plus uniforme, divisée en différentes catégories de risques.

Delen propose à ses clients huit échelles de risque. "Quand deux clients ont le même profil de risque, il n'y a pas de raison que le même portefeuille ne convienne pas aux deux clients. Chez beaucoup de concurrents, la complexité est trop importante. Quand on démultiplie les offres, cela devient difficile à comprendre pour le client et difficile à gérer pour les collaborateurs."

Le banquier privé estime qu'il n'est pas utile de vouloir à tout prix proposer des offres personnalisées, qui répondent parfois à des effets de mode: "Bien sûr, nous parions aussi sur des tendances nouvelles telles que l'intelligence artificielle. Mais nous n'allons pas développer des fonds thématiques uniquement autour de cela", indique-t-il. "Notre mission est de mobiliser l'argent des Belges pour participer à la croissance économique mondiale", poursuit Jacques Delen. "Nous agissons en bon père de famille. Nous voulons amener du rendement à nos clients, bien plus élevé que sur le compte d'épargne. Nous cherchons à battre le marché, mais pas de manière exagérée, sans prendre de risques démesurés."

Mordu de technologie

La banque Delen a, très tôt, investi dans les solutions technologiques. Aujourd'hui, la banque compte 150 informaticiens en interne, qui développent des logiciels maison. Le fondateur de Delen est un mordu de technologie.

"Ça m'a toujours intéressé. Je programmais moi-même les logiciels!", lance Jacques Delen. Une petite équipe de quatre personnes travaille même sur de nouveaux outils d'intelligence artificielle. Les algorithmes prendront-ils un jour le pouvoir sur la décision humaine? "Je ne donnerai jamais tout mon portefeuille à gérer par des algorithmes", assure Jacques Delen.

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